Revue sur le film “Introduction” (2021) de Hong Sang-Soo

Pendant qu’une personne à ma droite riait à chaque comique, tandis qu’à ma gauche, une autre baillait toutes les minutes, je me suis demandé à quelle introduction j’assistais. Est-ce l’introduction de la vie d’un jeune homme, d’une nouvelle génération en général ou bien de simples retrouvailles qui marquent le commencement d’une nouvelle vie ? 



Le 25ème film de Hong Sang-Soo réalisé avec deux de ses étudiants, réunit trois épisodes de la vie de Juwon, un jeune homme qui tente de trouver sa place dans ce nouveau monde. Ce petit film d’une heure est un film de lutte, que ce soit contre les conventions sociales mais aussi cinématographiques. 

Au travers des rapports intergénérationnels mère-fille comme père-fils, le film oscille entre les préoccupations et la nouvelle génération et celles de l’ancienne. Dans une confusion constante entre l’utilisation du tutoiement ou du vouvoiement, le réalisateur met en scène l’indécision et l’incompréhension de la nouvelle génération, face à un monde dont les rapports et les règles semblent être bien absconses.

Quant à la forme, il se cache derrière la fausse simplicité apparente des longs plans tableaux, une maîtrise du contenu et de la scénographie : que ce soit dans la chorégraphie des interactions ou dans la composition millimétrée du champ à la Ozu. Le noir et blanc, très peu contrasté et lumineux, permet de déphaser temporellement toutes les séquences, et nous plonge dans un monde contemplatif, à mi-chemin entre le rêve et la réalité.

Le film questionne la représentation du réel grâce à une approche spécifique du temps et du récit. Enfoncés dans nos sièges rouges, nous devenons témoins de fragments de moments espacés de grandes ellipses, sans aucune connaissance des volontés intérieures des personnages, et le tout accompagné d’une touche subtile de poésie et de nature. L’action semble suspendue, Juwon est toujours en train d’attendre à des endroits où il ne semble pas être le bienvenu, et les espaces semblent aussi incertains que la chronologie. 

Toutes ces impressions et images peuvent se mélanger pour devenir un souvenir commun qui continuera de vivre en nous même une fois le film terminé. Ou bien, elles produisent l’effet inverse, comme c’était le cas pour la personne à ma gauche qui baillait continuellement. 

Pour revenir sur la réaction de la personne à ma droite, elle n’était pas du tout injustifiée. À la manière d’une pièce de Kabuki, les personnages semblent monter sur la scène à chaque séquence d’une comédie dramatique à la façon de Hong Sang-Soo. Incapables de trouver leur place dans ce monde, ils font preuve d’une drôle de maladresse, autant gestuelle qu’orale. 

Pour répondre à mon interrogation du début, Hong Sang-Soo développe tout une palette de relations humaines pour nous proposer une Introduction à la nature des désirs dans la nouvelle, comme dans l’ancienne génération.

Bientôt en ressorties dans vos salles, et disponibles sur les plateformes.

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