Babouchka Babouche, parcours d’une Drag Queen et femme politique que l’on veut élire au présidentielles 2027 !

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© Photo : Xavier Dartayre

Babouchka Babouche, Drag Queen, femme politique et déesse nous transmet l’art de militer en détente. Au travers de ses performances artistiques, sarcastiques et militantes, l’artiste nous aide à repenser le paysage social et politique comme quelque chose qu’il nous est possible de moduler. Sa lutte contre l’exclusion fait partie intégrante de ses performances, n’hésitant pas à brandir des pancartes, enfonçant des portes parfois peu politiquement correctes, qui pourtant nous parlent. Nous avons ici tenté de retranscrire la voix d’un des Totem du monde LGBTQ+, Babouchka Babouche.



Initialement qui es-tu?

Je suis Babouchka Babouche, Drag Queen, femme politique et mannequin. Le grand public aurait dû me connaître en 2022 lorsque j’ai été candidate aux élections présidentielles. J’ai sorti une web série sur ma campagne. Je fais des spectacles, des meetings à Paris et dans d’autres villes. Je suis saltimbanque de métier et je vis actuellement du Drag ! Dans ma vie, j’ai été épicier, bibliothécaire, je suis en dernière année de licence de cinéma.

Quand as-tu commencé à pratiquer le Drag Show ? Comment as-tu connu ce monde-là ?

En 2017, je vivais au Texas, j’ai commencé à sortir dans des lieux où j’ai assisté à mes premiers drag shows, j’ai trouvé ça très intéressant. En revenant en France, je me suis lancé là-dedans pour m’amuser.

“Le Drag est une performance du genre.”

Quand était-ce ta première performance ?

Ma première performance s’est déroulée au sein du collectif ‘Maison Chérie’, sur ‘J’aime mon pays’ de Sexy Sushi. À ce moment-là, j’ai réalisé que c’était peut-être de cette nana-là dont la France avait besoin. C’était un moment de ma vie où j’avais le temps de m’investir dans cette pratique, la scène parisienne était assez dynamique sur le Drag et en même temps, il y avait beaucoup moins de shows qu’aujourd’hui. Avec des amis, on n’avait pas d’opportunités, mais on avait des choses à dire, donc on a créé nos propres opportunités.

Quels sont tes engagements, tes aspirations ?

Déjà, on peut aller au cœur des choses simplement : il y a des gens qui ont trop et des gens qui n’ont rien, du coup, il faudrait peut-être rééquilibrer. Ensuite, il faudrait un peu lutter contre le réchauffement climatique, parce qu’ayant moi-même vécu au Texas, je sais qu’avoir chaud, c’est chiant (rire). Et puis les discriminations, le racisme, l’homophobie, la transphobie, le sexisme, j’aime pas trop, ça nous rappelle les pires moments de notre histoire. Tu savais qu'à Cuba, les gens n’ont pas le droit de posséder plus de deux logements ? Je trouve ça très bien, mais c’est peut-être un peu radicale.

Tu utilises beaucoup l’humour pour véhiculer tes idées politiques..

Oui, aujourd’hui, la scène politique est un peu badante, que ce soient les agresseurs sexuels à LFI, les politiciens qui se foutent du réchauffement climatique, etc. Notre génération est quand même bien plus impliquée que la leur, il y a des choses que nous ne comprenons pas, comme le fait qu’on ne fasse rien pour l’écologie en France.

Est-ce que tu politises tes performances ?

Au début, je faisais beaucoup ça, et je me suis rendu compte que j’enfonçais pas mal de portes ouvertes. J’ai fait beaucoup de performances avec des pancartes, et c’est vrai que d’un point de vue artistique ça a peut-être ces limites (rire). J’enfonçais toutes les portes ouvertes que je pouvais.Maintenant, je pense qu’on peut tout à fait être une show-girl et une nana très classe, tout en étant nous-même avec nos idées.

Mais c’est vrai que vu que je ne suis pas impliqué dans un parti politique, j’ai l’impression d’avoir une certaine liberté de ton. Les gens m’autorisent à tenir des propos aussi révolutionnaires que « le racisme, c’est mal » ou « laisser les SDF à la rue, c’est méchant ». (rire). Ce n’est pas plus compliqué que ça en réalité.

Tu n’as jamais voulu intégrer un parti politique ?

J’ai failli passer dans le clip électoral de Monsieur Poutou qui a des engagements intéressants face à l’écologie, la communauté queer, la lutte contre les discriminations, etc. Mais non, je n’ai pas forcément envie de m’engager dans un parti quand je vois le paysage politique actuel.

© Photo : @galeriedelacasse

Tu n’as pas de sponsors non plus ?

Je n’ai pas de sponsor, la web série a été quasiment auto-financée, je finance tout ça grâce aux shows que je fais, je n’ai pas envie de dépendre des gens et je pense que ça irait à l’encontre de tout ce que je porte de demander aux gens de payer. N’empêche, je lutte activement contre le capitalisme, mais je cherche activement à me faire sponsoriser aussi, c’est mon paradoxe (rire).

Quels messages sociaux l’art du Drag te permet-il de véhiculer ? Qu’est- ce que tu souhaites dégager de toi et de la société ?

Ce que j’aime dans le Drag, c’est que c'est à la fois une forme artistique, mais c’est aussi quelque chose de communautaire.C’est un peu être animateur de colo pour adulte. Le drag n’est pas que de l’art, c’est aussi le « mono de ma colo », je pense qu’il ne faut pas prendre tout au sérieux non plus.

Dans la vie civile, j’essaie d’être “daddy”, et en drag j’essaie d’être “mother”, c’est-à-dire une femme rassurante maternante et qui fait légèrement peur. (rire)


Pourquoi le Drag plutôt qu’une autre forme d’art ?

Déjà, j’adore le glamour, j’ai toujours voulu faire du cinéma, mais quand j’ai commencé, j’avais pas tellement l’opportunité de faire ça. Avec le drag, tu peux imposer ton style. Un jour, j’ai dit que j’étais candidate à l’élection présidentielle, après je l’étais. Il y a des gens qui font du stand-up en drag, d’autres qui lip sync etc. Le drag est une manière de faire un tas de choses. On est un peu les totems de la communauté queer.

© Illustration : Vianney Chardon


Qu’est ce qui t’a donné envie de te présenter aux présidentielles de 2022 ?

J’ai réalisé qu'il n'y avait jamais eu de drag qui s’était présenté aux élections en France. Ensuite, je me suis dit que c’est un certain cirque ce qui se passe dans ce pays. Alors si c’est un cirque, un clown comme moi y a tout à fait sa place ! Je ne vois pas en quoi Babouchka Babouche serait moins crédible ou plus risible que Jean-Marie Le Pen (rire).


Peut-être même qu’il devrait faire du drag..

Le drag peut être très douloureux, et l’idée qu’il souffre me plaît, mais je n’ai pas forcément envie de l’accueillir dans la communauté.


Tu peux me parler de cette douleur que procure le Drag ?

Et bien, c’est tout le maquillage, les faux cils, les corsets, etc. Le Drag est une performance du genre. Mais moi, je cherche à me déguiser en Drag Queen, donc je tiens à en faire des caisses, là où je pense que les normes du féminin ont quand même évolué. C’est un travail qui est beaucoup de nuit aussi, ce n'est pas forcément bien payé. Après, je pense que tous les métiers artistiques, c’est une chance de pouvoir les faire.

Comment cette expérience d’élection s’est déroulée?

Alors, je n’ai pas demandé de signatures, mais j’ai fait une vidéo Konbini qui a pas mal tourné, et les gens commentaient « mais c’est une blague, ça va trop loin », et j’adore ces réactions parce que, évidemment que ça va trop loin, et ce depuis le début !

“Ce qui choque, c’est qu’il y est un type avec un maquillage magnifique et une perruque qui dise qu’il faut lutter pour l’écologie et contre l’injustice sociale ? Ça vous choque plus que les propos de la famille Le Pen, de Macron, que le 49,3 ?”


Parles nous un peu de la série que tu as sorti, quel est le message premier ? (Babouche Présidente, 2022)

Je trouvais qu’on manquait de visibilité pour la campagne, donc on s’est dit qu’on allait faire un documentaire, qui au final s’est révélé assez scénarisé, donc ça a eu l’effet escompté. Ça a été publié sur YouTube en 2022 avant les élections. On a filmé autour de Paris, en essayant de rendre compte du métier de Drag Queen.

C’est aussi une œuvre de divertissement bien que militante. Je pense que si on ne divertit pas, les gens n’écoutent pas.


Est ce que tu développes ou aimerais développer d’autres pratiques artistiques à côté ?

Bien sûr ! Actuellement, je suis en train de monter un spectacle, pour avoir plus de visibilité, donc on va faire un Tour de France. On sera à Lille, Lyon, Bordeaux, Toulouse et peut-être à la Pride Rurale (Pride des campagnes).

J’aimerais aussi tourner une suite à ma série, donc nous filmerions ce Tour de France. Et en ce moment, on cherche un lieu à l’automne pour exposer des œuvres dont je serai le sujet (rire).

© Illustration : @Kashalena_


Quel serait ton objectif à long terme ?

Personnellement, j’ai un Leitmotiv dans la vie, il faut laisser parler sa réussite. C’est la réponse (rire).


Un petit mot de fin ?

Mon mot de la fin, j’encourage votre électorat à changer le monde, mais également à se détendre en le faisant ! Et aussi ! « Be Yourself », parce qu’il ne faut jamais oublier que le B de LGBT, c’est pour « Be Yourself » !

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